| - Prêt a porter. |

Adossée contre la faïence humide, je profite pleinement de la chaleur que m'apportes l'eau qui ruissèle sur ma peau. Les journées sont longues ici, et voilà le seul petit réconfort que j'ai trouvé. Je reste généralement une bonne heure sous la douche, profitant de l'heure tardive pour ne pas être dérangé par une autre détenue ou un gardien. Mais il est temps de retourner entre ces quatre murs que je partage avec ces trois autres filles. J'aimerais retrouver ne serait-ce qu'une miette d'intimité... Qu'importe. Je coupe l'eau, et me saisis de la serviette que j'avais préalablement posée sur le petit muret. J'enroule le tissu autour de moi, puis j'essore mes cheveux avant de retourner vers les lavabos pour récupérer mes affaires. Mes pieds humides sur le carrelage produisent un bruit léger, à peine distinct. Ce qui expliquerait donc que la personne qui se tient près des miroirs, et qui semble fortement intéressé par mes affaires ne m'est pas remarqué. Je m'arrête donc, tordant mon cou pour essayer de voir le visage de la petite maligne.

- Excuse moi... commençais-je d'une voix qui se voulait plus inquisitrice qu'agressive. Mais je crois que c'est mon haut que tu portes.

Pour être honnête, je ne crois pas. J'en suis sûre. J'ai laissé mon vêtement près des lavabos, et il n'est plus à sa place. Sans parler du fait que le blason soit celui des carnivors, et que la pièce de tissu n'est absolument pas à sa taille. J'ai presque envie de rigoler face au ridicule de la situation. Je me tiens là, encore dégoulinante d'eau, et elle, elle porte mon haut, comme ci de rien n'était.

N'ayant en aucun cas peur d'elle ou une quelconque appréhension face à sa réaction, je finis de m'avancer, me plaçant non loin d'elle pour m'observer calmement dans la glace, avec un demi-sourire taquin aux lèvres.

- Tu voulais savoir ce que ça faisait d'être dans la peau d'un carnivor?

Le regard figé sur mon propre corps, j'essaye de comprendre ce qui peut pousser quelqu'un a subtiliser des vêtements, surtout ceux-là. Ces uniformes ne sont vraiment pas joli. Du moins, pas pour moi. Je perçois très brièvement le bruit de son inspiration, puis elle commence a parler, a bien trop parler. Je suis loin d'être stupide, mais avec la fatigue, je crois que son torrent de parole ne va pas tarder à m'assommer. Pendant qu'elle déblatère a propos des carnivors, d'un certain Cristiano et toutes ces autres choses, je sourcille étrangement, plaçant mon regard sur elle grâce au reflet. Soudainement le calme revient, et elle reprends son souffle. Lentement, je me tourne vers elle, posant mon regard sur son corps et sur son visage. Cette fille, elle est pas banale. Pas de doute là-dessus. Je me souviens pas l'avoir croisé dans les couloirs ni même ailleurs, alors, d'où est-ce qu'elle peut bien sortir ?

- J'apprécierai vraiment le fait de récupérer mes vêtements. Je n'ai pas vraiment l'habitude de rester aussi dénudée et surtout pas dans dans un endroit pareil.

Je pouffe légèrement de rire, m'appuyant contre le rebord de l'un des éviers.

- Je ne suis pas une brute, du moins, pas ce soir.

C'est vrai. J'aurai très bien pu lui sauter dessus et lui en mettre une. Ça aurait évité tout ce blabla, mais non, ce soir j'ai envie de me comporter comme quelqu'un de banale, quelqu'un de civiliser.

- Et comment se nomme l'emprunteuse de chemise ?

Je lui montre un sourire léger certes, mais tout de même bien présent. Personne n'est là pour me voir agir ainsi, a part elle. Et il est probable que c'est pour cela que j'agis de cette façon. Sans parler du fait que je ne me sens absolument pas menacer en sa présence.

Finalement, cette fin de soirée est plus plaisante que ce que j'avais imaginé, et même prévu. Aussitôt dit et presque aussitôt fait, elle enlève ma chemise, dévoilant le haut de son corps. Certes, les femmes m'attirent, bien plus que les hommes en général, mais là, je ne glisse même pas un œil sur sa poitrine. Le tissu vole et je le rattrape in-extrémiste avant qu'il touche le sol perlé des gouttes qui quittent mon corps pour s'y écraser. Tout ne lui prêtant une oreille attentive, je la frôle pour récupérer le reste de mes vêtements. Cassie? Non, jamais entendu parler. Je m'éloigne un peu d'elle, non pas par pudeur, mais juste pour ne pas lui mettre de coup en bougeant. Mes mouvements ont toujours étaient ample. L'assommer maintenant ne me servirait à rien. J'aurais bien aimé lui répondre, mais elle ne m'en laisse pas le temps, reprenant ce qui semble être une manie chez elle, parlé beaucoup et de façon très rapide. Lorsqu'elle se tait, j'hoche la tête de haut en bas, lui signifiant silencieusement que oui, je suis une carnivor. Je laisse tomber la serviette sur le sol, n'ayant en aucun cas peur de montrer ce corps que j'ai mis des années a sculpter, puis sereinement, comme ci de rien n'était, je reprends la parole, commençant a enfiler la chemise.

- Kristen, et je suis dans la cellule deux. T'es de la troisième, je suppose ?

Bouton par bouton, je recouvre mon corps. Pour les sous-vêtements, on verra ça plus tard. Une fois le dernier bouton en place, je balaye mes cheveux d'un geste de main rapide, dégageant mon visage de ma tignasse brune.

- Oui, je suis une carnivor. Et encore oui, je suis de ce fameux clan. De mauvaises personnes ? La plus part, certes. Mais il y a aussi des gens fréquentables. Les carnivors et même les BloodT, ne sont pas tous des brutes épaisses a qui il ne faut pas adresser la parole. Il faut être méfiant quant à certains, c'est tout.

Je marque une pause, pour reprendre mon souffle et voir si elle est toujours attentive.

- Pour l'instant, il n'est pas encore question de maîtriser tous les détenus, du moins, pas à mon sens. Il y a encore trop de choses à faire, a dire avant d'en arriver là.

Mes yeux se posent sur son haut. Elle a arraché le blason de son groupe. Quelle bonne idée. Cette fille est intelligente. J'esquisse un sourire et je m'approche d'elle lentement.

- Alors? Redweak ou Nobodies ou... Ordinaries, qui sait?

La maigreur que j'ai pu observer lorsqu'elle était dévêtue pourrait évidemment me faire penser qu'il s'agit d'une Redweak.
L'intelligence d'arracher le blason pourrait faire pencher la balance, une Ordinaries aurait sûrement pu avoir cette idée. Je me surprends moi-même, pourquoi suis-je si intriguée par cette fille ?

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